Alpha BLONDY - Interview - 25 Août 2012
Lyon
Alpha Blondy sur |
Alpha est biblique, je suis l'alpha et l'oméga. J'ai voulu mettre ma
carrière sous le signe du spirituel, sous la protection divine,
c'est pour cela que j'ai choisi Alpha, pour le commencement et
Blondy est le nom que ma grand-mère m'avait donné, pour les câlins !
Parce que le Reggae fait partie de ma culture africaine puisque
les Jamaïcains sont eux-mêmes africains avant d'être jamaïcains.
Après avoir fait du rock au collège et lycée, en arrivant aux Etats-Unis
j'ai découvert le Reggae et je voulais épouser une musique qui
défendait l'Afrique, qui gratifiait l'homme africain. Mon ego
était ragaillardi quand j'écoutais cette musique qui ne
rabaissait pas l'Afrique et les Africains. La dimension
socio-spirituelle-politique de cette musique m'a aussi séduit.
AM : Et on ne fait pas du Reggae par hasard.
Je ne crois pas au hasard. Je crois qu'il y a cette énergie
qui guide nos pas, et parfois on croit que l'on a choisi mais
en vérité on ne pouvait pas ne pas suivre cette voie-là.
Pour moi le Reggae c'est comme si j'avais toujours voulu
faire cette musique. Elle correspond à mon état d'esprit,
mon caractère. Si c'était pour faire de la musique en tant
qu'enfant du ghetto pour pleurnicher tout le temps, cela ne
m'intéressait pas, il fallait quelque chose qui donne de la
confiance en soi et qui peut aussi faire rêver les autres,
leur donner de l'espoir, c'est ce qui m'a séduit dans cette démarche.
Il y a eu du monde ! A commencer par le grand frère Johnny Hallyday,
Claude François, Pink Floyd, Deep Purple, Led Zeppelin,
Creedence Clearwater Revival, Otis Redding, Wilson Pickett,
Etta James, Aretha Franklin. J'ai eu la chance, d'être musicalement
né d'une sorte d'arc-en-ciel musical et culturel, ma culture africaine,
francophone et anglo-saxonne tout cela s'est retrouvé en moi et
cela se ressent dans mon travail, dans ma musique.
AM : Et le Blues qui est la racine aussi.
Voilà. Je suis un enfant né de tout ce mélange culturel,
je suis une mosaïque culturelle et j'assume ma
diversité culturelle.
Oui.
AM : C'est du dioula, ce n'est pas du senoufo ou du bété ?
Non, c'est du dioula, le dioula c'est le bambara. Le bambara
parlé en Guadeloupe, c'est comme l'anglais parlé en Angleterre
et l'anglais parlé aux Etats-Unis. Le bambara est parlé au Mali
et le dioula en Côte d'Ivoire.
AM : As-tu une préférence pour la langue dans laquelle tu chantes ?
Cela dépend dans quelle langue l'inspiration me vient. Il y a des chansons
qui me viennent en anglais et il n'y a rien à faire, je ne peux pas les
changer en français, même si je veux je ne peux pas. D'autres chansons
me viennent en français. Et des fois on me dit : Essaie de faire la
version anglaise, mais je ne peux pas, parce que Dieu m'a envoyé
cette inspiration en français et ce sera chanté en français avec
ma sensibilité francophone.
Oui.
AM : Pendant ces 30 années, as-tu pu faire tout ce que tu souhaitais musicalement parlant ?
Oui, je crois qu'on n'a pas fini de faire ce qu'on veut parce
que l'éventail des possibilités est tellement large. Je découvre
tous les instruments que j'aime entendre, je n'ai pas encore fini
de les mettre dans mon Reggae. Le Reggae était au début très tribal,
très ethnique. J'ai apporté dans le Reggae le violon, la cornemuse,
l'accordéon, la kora, la darbuka, la flûte traversière et la flûte
du Fouta Djallon, et plus j'avance plus j'aime innover.
Mon prochain album, si Dieu le veut, va découvrir une nouvelle
matrice d'un Reggae nouveau, parce que je veux que le Reggae
ne demeure pas stagnant, il faut un Reggae évolutif sur le plan
musical pour pouvoir toucher ce public qui vient à nos concerts.
Je ne vais pas dévoiler le secret du prochain album mais en
tout cas, il s'appelle Mystic Power et il y a ce que je voudrais
apporter en tant qu'Africain, que Reggae africain, apporter
un plus au Reggae planétaire.
En effet. Vision est pour moi une thérapie musicale. Alpha Blondy
sans ambages se soigne, se livre. Tous les psychiatres et les
psychologues vous le diront, il ne faut pas garder les choses en soi,
il faut les sortir et cet album c'est ça ! Alpha Blondy dit les
choses et puis en même temps il veut dire aux politiques qu'ils
ont oublié l'essentiel qui est l'être humain et j'ai parfois le
sentiment qu'ils ont mis l'argent avant l'être humain.
AM : Et le pouvoir.
Exactement. Il faut qu'ils recentrent leur politique. Il faut que
l'homme reprenne sa place, que l'homme soit au centre de toutes les
politiques. S'ils veulent éviter la révolution comme dans les pays
arabes, cela peut arriver aussi en Afrique noire, en Europe, parce
que les politiques ont omis de resituer l'être humain au centre de
la politique. Qu'ils arrêtent de se plaindre, on ne peut pas faire
ça parce qu'il n'y a pas d'argent. Par contre on peut faire la guerre.
Apha & AM : Oui, là il y a de l'argent !
Je pense qu'il faut qu'ils reconsidèrent l'être humain et que l'on
remette l'être humain au centre de la préoccupation.
AM : Et arrêter aussi tout ce qui est pourri.
Arrêter tout ce qui est pourri, ça ce n'est pas sûr, parce que la
politique c'est gérer la pourriture, mais quand eux aussi engendrent
un bon paquet de pourriture...Mais leur mission c'est de gérer la
pourriture du monde. Si l'être humain qui a supposé secréter toute
la pourriture est à l'aise peut être que la production de pourriture
sera atténuée. Plus l'homme sera mal dans sa peau; si tu pourris la
vie au peuple, le peuple te pourrira la vie.
AM : Le peuple va se révolter.
Exactement, c'est vrai. Il faut que l'être humain, ce divin,
reprenne sa place.
C'est assez dramatique, on ne va pas en rajouter (riant).
Dès fois on me dit que j'aborde des thèmes qui sont un peu lourds,
je me suis dit on va quand même dire quelque chose de très
sérieux mais de façon légère. Avant de faire l'amour il faut
se protéger du Sida, si on veut faire waka-waka, si le
waka-waka est sécurisé le vuvuzela peut sonner. C'était
ma façon de dire aux jeunes c'est bien l'amour mais
parfois il faut se protéger.
C'est mon ami.
AM : Oui.
Mon ami avec qui j'avais grandi et qui est décédé. Je lui ai
dédicacé cette chanson dans laquelle je dis chacun a son jour.
Il y a le jour où tu nais et le jour où tu meurs. Il y a des
jours où tu ris et des jours où on pleure. Tout ce qu'un être
humain souhaite c'est la longévité, la santé et le bonheur.
Nous aspirons tous à cela. Cette histoire de demain, parce que
demain c'est la minute qui vient, le mois qui vient ou l'année
qui vient ou le siècle à venir. Cette histoire de demain comment
est-ce que nous la gérons ?
Oui nous avons fait une compil de live qui ont été faits
par Alpha Blondy. Celui-ci (montrant le CD) est le live au Zenith,
c'est le premier, il est torride ! Il faut absolument l'écouter.
Et il y a aussi le live à Bercy qui est un peu aux couleurs
de la crise ivoirienne, puisque c'était au moment où la Côte
d'Ivoire avait un peu basculé, et depuis d'ailleurs on n'arrête
pas de basculer...J'espère que cela s'arrêtera un jour.
Cet album il ne faut pas le rater ! Live.
AM : 3 CD
Il y a 3 CD, vous achetez un album, vous avez 3 CD, vous vous rendez compte !
Et l'album Vision vaut également le détour. Cela fait du bien
aux oreilles et je disais à quelqu'un que cet album est tellement
bien qu'il faudrait qu'on le vende en pharmacie !
AM : Il y a même une vidéo en bonus.
A tous les concerts pour moi c'est le meilleur souvenir.
Donner du plaisir aux gens cela n'a pas de prix.
Quand vous voyez que les gens, malgré la crise que vit le monde,
sont venus voir votre gueule et qu'ils oublient tous leurs
soucis et qu'ils dansent, des fois après le concert, quand
je suis dans ma loge, il m'arrive de pleurer, de voir tout
ce bonheur, tous ces jeunes, les moins jeunes qui sont venus
vibrer au son de la musique, un truc aussi simple, il n'en
faut pas beaucoup pour rendre les gens heureux. Pour moi en
tout cas à tous les concerts, c'est comme si c'était un premier
concert parce que je me dis voilà les gens qui t'ont fabriqué,
de leur amour, tu es né, donc c'est comme si chaque fois je
devais prouver à ces gens qu'ils n'ont pas eu tort de m'accorder
leur amour, qu'ils n'ont pas eu tort de respecter mon travail,
donc je suis tout le temps sur scène en train de leur donner
raison, de donner le maximum, le meilleur de moi.
AM : Et tous unis pour la musique, puisque la musique est universelle.
Exactement et quand vous avez la chance de voyager de par le monde
et de jouer pour différents publics, le constat est le même,
le monde gravite autour de l'amour, l'amour qu'ils nous donnent
et l'amour que nous leur restituons et ça...
AM : Cela n'a pas de prix.
Oui cela n'a pas de prix !
Qu'ils viennent et que l'on fasse la fête ensemble, que l'on passe ce
temps que Dieu nous accorde ensemble dans le bonheur, dans la joie,
dans l'amour. Voilà pour nous ce sera le biais pour le paradis.
Je voudrais leur dire que je les aime énormément. Merci pour
leur amour, merci pour leur respect et que Dieu leur rende au
centuple et je les aime très très fort.
La fin de la guerre sur la terre, premier souhait.
Deuxième souhait, la fin de la guerre sur la terre,
et le troisième souhait, la fin de la guerre sur la terre.
AM : Merci beaucoup Alpha. Nous te souhaitons un
très bon concert pour ce soir et que tes chansons continuent
à faire le tour du monde et merci pour ton combat d'artiste pour la paix...
Merci à vous.
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