Daniel DARC - Interview - 14 Mars 2012
Epicerie Moderne
Oui malheureusement !
AM : Nous avons tous grandi avec des influences musicales diverses et
variées dont tu as fait partie quand nous étions ados d'ailleurs.
Quelles ont été tes influences musicales Daniel ?
J'étais 50's, je traînais avec une bande de rockers. Le premier chanteur
qui a changé ma vie a été
Elvis Presley, ensuite ce fût
Gene Vincent,
puis j'ai écouté - par l'intermédiaire d'un de mes potes qui sortait de prison
- Raw Power des
Stooges
et Tyranny & Mutation de
Blue Öyster Cult,
j'ai ensuite écouté du Pub Rock et du Punk.
Oui.
AM : Te souviens-tu comment et où tu as rencontré les autres membres du groupe ?
Oui c'était au Lycée Balzac. Je me suis débrouillé pour être admis dans cet
établissement parce qu'à l'époque c'était le lycée où il y avait tous les autonomes,
il y avait des cours d'arabe ce qui était assez rare à l'époque, et les mecs de
l'extrême gauche étaient là. Je devais aller dans un autre établissement qui
s'appelait Jean-Baptiste Say qui est un truc de bourges mais je me suis arrangé
pour être scolarisé à Balzac où j'ai
rencontré
Laurent Sinclair
le clavier qui sortait d'ailleurs avec
Joelle Aubron
d'Action Directe, et il y avait
Mirwais
et
Pierre le batteur, qui n'étaient pas
avec nous, mais ils traînaient à Balzac
parce qu'ils dealaient des acides et il y avait aussi le bassiste qui s'appelait
Stéphane Erard.
Ils cherchaient un chanteur et ils m'ont demandé si j'en connaissais un,
j'ai dit non mais je peux essayer et puis voilà !
J'ai fait un essai et il a été concluant !
J'avais 18 ans, c'est vachement étonnant parce que je viens d'un milieu prolo,
je ne suis pas le fils de quelqu'un, pour moi c'était étonnant.
AM : Et ensuite de se voir à la télé ?
Mon père voulait comme tous les feuges que je sois avocat ou médecin et il avait
acheté un magnétoscope à l'époque pour enregistrer mes passages télé quand même.
Je n'aimais pas me voir à la télé, je n'aime toujours pas me voir à la télé,
je n'aime pas m'entendre non plus, les chansons ça va mais je n'aime pas
entendre les trucs en direct, mais j'ai adoré ma première Sacem !
Ah encore !
AM : Il fallait oser à l'époque.
Après tu vas me faire Dieu ?
AM : Non, non, pas du tout ! ça fait mal en plus !
Ouais (montrant son bras) c'était à ce niveau là et puis comme le sang
ne coulait pas assez alors j'ai fait une entaille ici et j'ai touché une artère,
alors ça coulait fort !...
AM : C'était au Palace en 79, vous faisiez la première partie de
Talking Heads.
Oui c'est exact. Mais non cela ne fait pas vraiment mal, j'étais habitué un peu à
avoir mal, j'avais un cutter dans la poche parce qu'on se foutait sur la gueule,
j'étais dans une bande, je me battais assez souvent aussi avec mes anciens potes
rockers puisque j'étais devenu un punk.
AM : C'était une performance, une provocation ?
Non non c'était juste comme ça, pour le fun, j'ai demandé à Laurent le clavier,
qu'est-ce que je peux faire ce soir ? (Car je ne suis même pas timide, je suis
phobique social pour les médecins) et il m'a répondu : eh bien tranche-toi les
veines, je lui ai dit oui je vais le faire, il n'y a rien d'intelligent ! (riant).
Auteur plus que compositeur.
AM : Peux-tu nommer quelques noms de personnes avec qui tu as travaillé ?
Avec ou pour ?
AM : Les deux.
Avec
Bill Pritchard,
Jacno,
Etienne Daho.
AM : Il y a eu
Polyphonic Size
aussi.
Oui Polyphonic Size,
Jean-Jacques Burnel
qui avait produit leur premier album.
AM :
Marie-France
aussi.
Oui les chanteurs pour qui j'ai écrit sont entre autres Marie-France,
Marc Minelli,
Marc Lavoine,
Tcheky Karyo,
Alizée.
Oui il est pianiste-compositeur et il est surtout producteur.
AM : Il y a longtemps que vous vous connaissez ?
Non, quand on est entré en studio on se connaissait depuis 4-5 mois avant la
sortie de l'album. On a bossé et fait ce CD en improvisant les textes.
On s'est connu par le chanteur
Christophe
dont le vrai nom est Daniel Bevilacqua,
il m'a dit j'aimerais bien que tu rencontres un de mes potes parce que je
pense que vous pourriez travailler ensemble.
AM : C'est plus facile de travailler à deux ou bien tout seul ?
Jusqu'à présent j'ai toujours travaillé avec quelqu'un parce que lorsque
j'écris des textes je n'arrive pas à voir ce qui est bien et ce qui est
moins bien, j'ai toujours besoin d'avoir un oeil extérieur. Le prochain album
je vais également le faire avec Laurent, à moins que je rencontre quelqu'un,
mais j'aime bien travailler avec lui. Mon objectif dans le futur serait
d'être auteur-compositeur-producteur, mais pas pour le prochain album
mais peut être pour le suivant !
Je ne sais pas. J'ai tellement écouté Gainsbourg que je suppose que cela se sent aussi.
Et puis j'emploie beaucoup la technique vocale du talk-over. Je crois que j'écris pas
mal en français, je ne pense pas être un bon chanteur mais je pense qu'il y a des mots
peu usités dans la langue française, dans la variété. Je suis forcément influencé par
Gainsbourg même si j'écoute plus du tout, je n'écoute pas la musique française de
toute façon, cela me fait chier.
AM : Il y a combien de chansons sur cet album ?
Je m'arrange toujours pour qu'il y en ait maximum 10 mais on a rajouté des petits trucs.
AM : Il y en a 12 avec quatre variations. A quoi servent-elles ces variations sur cet album ?
Je ne suis responsable que d'une seule ! J'ai demandé à Jean-François qui joue du violoncelle
ce soir, peux-tu me faire la 7e variation pour violoncelle de Bach qui n'existe pas bien sûr
parce qu'à l'époque on n'écrivait pas 7 parce que le chiffre 7 était réservé à Dieu,
il n'y en a que 6. Il a fait un morceau qui s'appelle Ana que j'aime beaucoup et pour
les autres variations Laurent m'a dit : Tu me laisses faire, j'ai des idées.
Et je les ai bien aimées !
Il a été enregistré à Ivry dans le studio de Laurent Marimbert.
AM : Avec quels musiciens ?
Les musiciens qui sont avec moi pour le concert de ce soir, c'est-à-dire
Philippe Entressangle
à la batterie, les claviers et quelques guitares c'était
Laurent Marimbert. L'ingénieur Ghislain qui joue de la clarinette sur un morceau,
Rémy Bousseau
mon pianiste qui joue de la flûte traversière,
Jean-François Assy
qui joue du violoncelle et un guitariste
François Delfin, le bassiste
Olivier Brossard et
Benjamin Charavner qui joue de tous les instruments un peu bizarres, banjo, ukulélé, mandoline.
Je ne sais pas, franchement !
AM : Est-ce qu'on peut faire un petit jeu entre toi et moi ?
Oui.
AM : Décortiquer tes chansons pour les comprendre ensemble. Je te donne
cette feuille qui correspond à tes chansons, peux-tu commencer par la première ?
Ira, c'est l'histoire d'une fille, une sublime histoire d'amour que j'ai vécue parce
qu'elle est lesbienne donc je savais que je n'avais aucune chance dès le départ,
c'était cool, elle doit vivre maintenant en Angleterre, c'est une meuf bien,
c'est une copine de Virginie Despentes.
AM : C'est Moi le Printemps. C'est toi le Printemps Daniel puisque tu es né au mois de mai ?
Oui je suis né le 20 mai mais j'ai volé cela à Céline dans Mort à Crédit.
AM : La Taille de Mon Ame. Elle est comment ton âme Daniel, grande, petite, colorée ?
Ni plus ni moins grande que celle des autres. J'ai écrit cette chanson un matin
où il fallait que je boive, je suis allé dans un café à côté de chez moi, j'habite
vers Bastille c'était 4 ou 5 heures du mat donc il n'y avait que là que je pouvais
trouver un café d'ouvert. J'ai bu un demi ou deux et j'avais mon carnet que j'ai
toujours avec moi, il y avait des bouchers qui étaient bourrés et il y en a un qui
s'est mis à gueuler si tu savais la taille de ma bite, et j'ai trouvé ça génial,
mais bon j'ai préféré mettre âme que bite !
AM: On passe à la chanson suivante.
C'était Mieux Avant. Le pire c'est que je le pense.
AM : Au niveau de la musique par exemple ?
Concernant un peu tout, surtout parce que l'on regrette toujours sa jeunesse.
Au niveau de la musique, oui, depuis
Amy Winehouse
il n'y a pas grand-chose
qui m'a touché. J'aime bien, je ne sais pas si c'est elle ou juste une production
celle qui a des grosses lèvres,
Lana Del Rey, elle chante Blue Jeans.
Tu ne connais pas ça ? Elle a été numéro un partout.
AM : Non, j'écoute plutôt les "vieux de la vieille" !
Donc toi aussi tu penses que c'était mieux avant ?
Je ne sais pas mais mes oreilles sont plutôt habituées à ce que j'écoutais quand
j'étais ado, toute cette musique et ces mouvements m'ont marquée, j'ai grandi avec
vous tous, c'est sans doute pour ça !
AM : Que penses-tu d'Ana ?
C'est une femme qui s'appelait Anabelle. Ensuite il y a la variation numéro 1 sur
laquelle Jean-François joue du violoncelle.
AM : My Baby Left Me.
C'est Laurent qui a fait la musique. Le micro était ouvert en permanence et un jour
j'arrive et je lui dis, peux-tu enregistrer ce que je vais faire ? J'ai improvisé
pendant une quinzaine de minutes, ensuite il m'a dit ok je vais préparer un truc
pour demain et il a construit quelque chose, on aurait pu faire 10 chansons avec
ce qu'il a fait. Il a articulé la chanson sur ce que je disais et j'ai trouvé ça bien.
AM : Seul Sous La Lune.
J'aurais bien aimé la donner à
Alain Chamfort, je trouve que cette chanson lui irait bien.
Je me suis inspiré d'un poète chinois que j'adore qui s'appelle Lipo, il a écrit
un ouvrage qui s'intitule L'immortel banni sur terre buvant seul sous la lune.
AM : Vers l'Infini
Je le confonds toujours avec Sois Sanctifié car ce sont deux chansons qui parlent de mes potes disparus et puis de moi aussi de toute façon.
AM : Quelqu'un qui n'a pas Besoin de Moi.
C'est un peu un hommage à ma femme, cela fait plus d'un an et demi que l'on est ensemble.
On s'est rencontré dans un café, chez des potes et on est sorti ensemble.
Elle m'appelait Daniel forcément et après qu'on soit sorti ensemble elle a appris
que j'étais l'ex-chanteur de Taxi Girl, elle a dit ah non merde je déteste ce groupe !
J'ai trouvé ça génial car je savais que ce n'était pas une groupie !
C'est cool d'être avec elle.
AM : Les Filles Aiment les Tatouages.
J'ai écrit cette chanson au yukulélé, je me suis dit 20 ans de flamenco pour arriver là ! Et je l'ai fait refaire par Benjamin Charavner, je suis l'auteur-compositeur et je l'ai faite chez moi en 5 minutes !
AM : Et puis tu en as beaucoup des tatouages sur toi, donc les filles doivent bien t'aimer !
Sexuellement j'assure pas beaucoup alors là au moins (montrant ses bras) il y a de la lecture par respect.
AM : Je suis sûre que c'est faux.
Tu veux dire la lecture ou que j'assure pas ?
AM : Que tu n'assures pas.
OK ça dépend qui est avec moi !
AM : Les Voeux de Bonne Année.
C'est Marc Dufaud, qui est écrivain, qui a trouvé le titre. J'ai deux amis vraiment,
Marc Dufaud est l'un des deux. Il a écrit une biographie de Springsteen.
Il en fait une sur Elvis maintenant.
Je lui disais que ça allait plus vite maintenant pour souhaiter
la bonne année car la plupart sont morts.
AM : Sur les carnets d'adresses, les pages se tournent un peu plus vite qu'avant...
Avec un Iphone tu vas plus vite (rigolant)
AM : Sois Sanctifié, qui a un aspect religieux.
Oui, un aspect religieux mais en fait à l'entrée d'une église un jour il y avait une
feuille sur laquelle il y avait écrit : même si j'avais commis tous les crimes
du monde ce ne serait rien qu'une goutte d'eau, et j'ai trouvé que c'était beau.
Celle-ci ? (montrant son bras)
AM : Non, celle-ci, c'est la croix des protestants. Tu es protestant maintenant ?
Oui, une conversion c'est tous les jours, mais j'ai été baptisé en 97.
AM : Quels sont les musiciens qui jouent avec toi ce soir à l'Epicerie Moderne ?
Ceux que j'ai cités plus haut.
AM : OK. Quand tu n'écris pas, que tu ne composes pas, que tu ne chantes pas,
quelles sont tes passions, tes passe-temps ?
Je collectionne les couteaux, je prends des cours de self-defense, je fais du Tai-Chi,
je fais du fixie qui est un vélo en pignon fixe, sans vitesses, sans freins,
pour freiner il faut bloquer la roue arrière (Daniel mime),
c'est hyper dangereux mais j'adore.
AM : Et je pense que tu lis également !
Oui.
AM : Tu pratiquais les arts martiaux ?
Oui j'ai fait du karaté assez longtemps.
Oui un nouvel album et je vais peut-être écrire des nouvelles, une autobiographie
que j'écris avec
Bertrand Dicale
et j'aimerais bien rester en vie.
AM : Oui, bien entendu, en plus tu as quelqu'un qui t'aime donc tout va bien !
Daniel merci pour le temps que tu as bien voulu nous consacrer.
Merci Anne-Marie, merci Bernard.
AM : On sera très heureux de t'applaudir ce soir.
C'est cool, mais tu ne sais pas encore tu vas peut-être me siffler ce soir !
AM : Cela m'étonnerait !
Hier Philippe et moi-même n'étions pas géniaux mais ce soir on verra !