Richard Bona
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Interview Bill DERAIME
Samedi 5 octobre 2013 - Salaise Blues Festival


Bill Deraime Site Kent Site

  1. Bonjour Bill, bienvenue sur rock-interviews. Ton vrai nom est Alain Deraime, pourquoi as-tu choisi Bill comme nom de scène ?
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    Ce surnom m'a été donné à 17-18 ans. Je jouais de la guitare et chantais des chansons de Big Bill Broonzy. Quand je suis arrivé à Paris, à Montmartre, on m'appelait Bill. Donc ce n'est pas un pseudonyme mais un surnom que j'ai eu, notamment grâce à Big Bill Broonzy.







  3. On ne fait pas du Blues par hasard.
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    Non.

    AM : Pourquoi as-tu choisi ce genre musical ?

    Ce n'est pas moi qui l'ai choisi mais plutôt lui. Comme je te disais je suis tombé amoureux de Ray Charles et de tous les Bluesmen que j'ai écoutés, et la musique Noire en général. Plus tard j'ai beaucoup aimé Bob Marley ainsi que le Rhythm and Blues. J'ai fait une adaptation de Sitting on the Dock of the Bay d' Otis Redding. Pour moi c'est essentiel parce que quand j'étais jeune, j'habitais Senlis, une ville, sombre et moyenâgeuse. Je suis né après la guerre, dans un endroit insalubre. Il y avait quelque chose de très dur et triste. Quand j'ai écouté du Blues j'ai ressenti quelque chose de très profond. Depuis ce temps-là et à travers tout cela j'ai aussi découvert la religion, car j'ai écouté du gospel. J'étais élève dans une école où il y avait un prof d'anglais, qui nous faisait écouter du gospel. Il était prêtre. J'étais externe au collège des Maristes à Senlis. Avec ce prêtre on a monté un gospel choir, un choeur de gospel avec une vingtaine d'élèves. Je jouais de la guitare et j'étais le maître du bateau. Ensuite j'ai fait plein d'autres choses, mais tout cela a guidé ma vie. C'est le Blues qui m'a choisi et à travers lui une certaine spiritualité. Je suis très attiré par la spiritualité des Noirs, tout ce qui est lié à l'origine, quand ils étaient esclaves dans les champs de coton et se réunissaient pour chanter ensemble, pour une lutte politique.

    AM : Bien entendu. (c) Copyright Rock-Interviews.com

    Petit à petit cela a donné des églises contestataires du système jusqu'à Martin Luther King et dernièrement Obama. La musique a beaucoup d'importance. Ce qui les réunissait était la musique. A travers elle ils ont mené une lutte sociale, avec les marches de Martin Luther King, les gospels, We Shall Overcome. Je trouve qu'aujourd'hui, dans la chanson française, on a perdu le feeling qu'avaient Edith Piaf et Jacques Brel. Aujourd'hui on fait des belles chansons, mais c'est de la chansonnette, des jolies rédactions. Dans toutes ces chansons il manque la vie. Pour moi la musique c'est la vie, le Blues. La première phrase que j'ai lue était Blues is life. On chante ce que l'on vit, on vit ce que l'on chante, et cela manque dans la chanson française. Le dernier en date était Claude Nougaro. Bien sûr il y a encore Higelin, Lavilliers, mais dans la nouvelle chanson française je ne vois pas émerger quelque chose de fort, dans cet esprit-là. Quand je vois tous ceux qui marchent bien, il y en a quelque-uns que j'aime bien, mais il n'y a plus dans la chanson française ce qu'il y avait autrefois, ce feeling qui venait de la rue. Edith Piaf, Jacques Brel ont chanté dans la rue, dans le métro. J'ai rencontré une accordéoniste qui le connaissait très bien. Jacques Brel allait dans un cinéma, Le Trianon, où il écrivait ses chansons car il y avait des séances permanentes. Il restait là tout l'après-midi car il habitait dans un endroit froid et écrivait ses chansons dans ce cinéma où il n'y avait que des films de cow-boys. C'est pour cela que quand il a arrêté la chanson il a fait le film Le Far West. Pour moi Jacques Brel et les autres sont des références. Quand j'étais petit ma mère et mon père écoutaient Edith Piaf et de l'accordéon.


  5. Pourquoi as-tu choisi d'écrire plutôt en français ?
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    J'ai chanté beaucoup en anglais jusqu'à 33-34 ans. A 26 ans on m'a demandé d'être éducateur avec Florentine, ma femme, dans une maison à la campagne pour accueillir des gens qui sortaient de la dope, de la défonce. Je me suis rendu compte que quand je chantais en anglais...

    AM : Oui, je suppose que les personnes accueillies ne parlaient pas spécialement anglais.

    Oui, cela a peut-être été le déclencheur et j'ai pensé que c'était mieux aussi de parler notre langue.

    AM : Bien sûr.

    Tout en sachant que ce n'était pas facile. Quand je réécoute ce que je chantais au début c'était loin d'être parfait parce que je n'avais pas encore le feeling non plus ! C'est avec la vie qu'on acquiert une voix, que l'on a des choses à dire.

    AM : Oui on a l'expérience.

    C'est pour cela que l'on dit les Bluesmen c'est comme le bon vin il faut qu'ils soient vieux pour bien faire.



  7. As-tu pensé un jour à exporter ton Blues à l'étranger ?
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    J'ai chanté au Canada, en Suisse. C'est vrai que le Blues francophone est difficile à exporter. Au Canada, ils parlent français donc il n'y a pas de problème. J'ai bien sûr chanté en Belgique. C'est difficile à exporter car on est quand même très attaché à la langue par rapport à la musique.


  9. Te souviens-tu de ton premier disque ?
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    Oui, c'était un disque de Festival à Lambesc. Il y avait beaucoup de participants. C'était un festival extraordinaire avec une dizaine de milliers de personnes. Tout le monde rentrait en donnant ce qu'il pouvait ou en échangeant des choses comme une ceinture en cuir par exemple. Tous les musiciens étaient venus gratuitement.

    AM : D'accord.

    Joan Baez devait venir ainsi que d'autres artistes qui ne sont pas venus, mais il y avait beaucoup de monde. C'était vraiment un moment de fraternité que l'on ne voit plus lors des festivals aujourd'hui. Ce n'est plus pareil. Tout le monde lève les bras en même temps, avec la lumière, on saute tous en même temps. A l'époque on écoutait la musique assis et puis ça vibrait quand même. On se levait avec le rock bien sûr mais ce n'était pas, tous pareils, tous en même temps. Aujourd'hui on suit comme des moutons. Je trouve qu'à l'époque on écoutait la musique différemment. Il y avait moins de tubes. Par exemple, quand on a fait ce festival où il y avait 10 000 personnes, il n'y avait personne de connu, enfin à part Roger Mason, un compagnon de Donovan, Deroll Adams et Alex_Campbell, Alexis Korner, des gens de la Beat Generation. Ils étaient connus dans le milieu Folk, marginal, hippie. Il n'y avait pas de tubes et pourtant il y avait du monde à ce festival.


  11. Aujourd'hui nous allons parler de ton dernier album qui vient de sortir. Il s'appelle "Après Demain".
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    On va le montrer. Après Demain, le voici. Il est très bien !

    AM : Oui et ce que l'on peut également beaucoup apprécier c'est qu'il y a les paroles de tes chansons.

    Oui.

    AM : C'est important dans une pochette de disque de glisser un livret avec les paroles des chansons. Bien entendu également des photos, le nom des personnes qui ont participé à cet album, car un disque ce n'est pas une seule personne, mais une équipe.

    Dans ce cas, c'est vraiment un groupe. Il y a aussi un personnage fabuleux qui a joué avec Bob Marley. Il a fait des arrangements pour Sting, en France pour Gainsbourg, c'est un organiste qui s'appelait avant Soran et qui s'appelle maintenant Jean Roussel, il est Mauricien. Il a joué avec beaucoup de monde. Il a commencé à jouer à 16 ans. Il a beaucoup travaillé avec Cat Stevens qui s'appelle aujourd'hui Yusuf Islam. Il continue d'ailleurs à jouer avec lui. Il a un studio dans la banlieue parisienne où on a commencé à travailler ensemble, avec le groupe. Il nous a fait travailler pour que ce disque, comme on dit, monte d'un étage !



  13. Comment vois-tu l'avenir du Blues en France ?
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    C'est difficile, en tout cas pour moi. D'autant plus que je suis Français, je chante en français, je suis blanc et je suis vieux ! Je pense qu'il faut s'accrocher. Je parle du Blues en français. Ce n'est pas facile. J'aime bien aussi les groupes, comme celui de ce soir, qui chantent en anglais, j'ai moi-même chanté en anglais jusqu'à 33 ans. C'est une bonne école, mais il faut bien que cela débouche sur quelque chose qui se raconte, qui se dise et que le public comprenne. C'est une musique vivante. C'est difficile car il y a une concurrence terrible avec ne serait-ce que les supermarchés, car quand on entre dans une grande surface on écoute les radios et les titres en vogue. Tout cela étouffe la musique vivante. Il faut que le public suive aussi et s'ouvre à cette musique-là, pas seulement en disant c'est de la vieille musique. C'est une musique qui véhicule une fraternité, une âme, quelque chose de très profond, qui vient d'un peuple, comme dirait Tonton David, qui a souffert, qui véhicule quelque chose de fort et qui peut aider beaucoup de gens. J'ai des amis qui écoutent du Blues. J'avais un ami atteint d'un cancer. Sa femme me racontait qu'il écoutait tous les matins un titre de Blues et cela jusqu'à sa mort. La musique l'a beaucoup aidé. Je crois qu'il faut se donner la peine d'écouter du Blues. Il y a des jeunes qui s'intéressent au Blues. Dans ce disque il y a un quatuor (c) Copyright Rock-Interviews.com de jeunes choristes. Les cousines du preneur de son qui sont noires. Quand elles sont venues au studio, à la plus âgée qui avait 14 ans, je lui ai demandé ce qu'elle aimait comme musique, elle m'a répondu Etta James. Elle m'a même mimée Etta James en train de chanter, c'était son idole. Le Rap par exemple vient du Blues. Je me souviens avoir entendu le leader d' IAM, Akhenaton, parler du Blues d'une façon positive. Il disait que le Blues était nos racines à nous tous. Le Rap a une rythmique à l'origine du Blues et du Rhythm'n'Blues, c'est bien de sa part de le dire.



  15. Ce soir tu es au Festival de Blues de Salaise avec tes musiciens, peux-tu nous les présenter ?
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    Il y a mon fidèle compagnon, guitariste, avec qui je joue depuis 35 ans qui s'appelle Mauro Serri. Il vient de Sardaigne. Le batteur qui est le deuxième plus vieux du groupe, puisque cela fait 12 ans que je joue avec lui, s'appelle Stéphane Pijeat. Le clavier, Didier Le Roux et le bassiste Denis Ollive, qui vient de Marseille comme son nom l'indique !

    AM : Merci Bill pour ton temps et très bon concert pour ce soir au Festival de Salaise.

    Merci beaucoup.

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