Interview - Eric TER
Lundi 6 Mai 2013
Bonjour.
AM : Bienvenue sur rock-interviews. Nous allons si tu le
veux bien remonter un peu les aiguilles du temps. Depuis 1952,
date de ta naissance à Paris, tes fans te connaissent sous différents noms,
n'est-ce pas ?
Effectivement, j'ai cru bon à une époque de changer mon nom.
C'est une idée qui vaut ce qu'elle vaut. Je me suis fait appeler Eric Sirkel.
J'ai inventé ce nom dans les années 70, pour mes deux premiers albums.
Maintenant je m'appelle Eric Ter, qui est le début de mon vrai nom.
Il me va mieux et je le préfère.
Blues, Rock, Folk, Funk, oui, tout cela va bien. Groove aussi.
J'ai des influences diverses. Il n'y en a pas qu'une, il y en a beaucoup.
Mon style est un peu difficile à définir. Je pense que les gens qui
font quelque chose d'original sont très peu souvent dans une catégorie
restreinte. Leur particularité c'est d'avoir leur propre catégorie,
qui n'existe pas ! Malgré que cela regroupe toutes ces influences.
AM : Justement quelles ont été tes influences musicales ?
Quand j'étais gamin, cela fait tellement longtemps, parce que je suis
tellement vieux ! J'ai commencé à m'intéresser à
Salut les Copains
que j'écoutais dans les années 60. Après il y a eu le Rhythm and Blues,
Wilson Pickett,
etc. Et puis j'ai eu deux ou trois grands flashs dans
les années 70, c'était même plus tôt que cela, en 66. J'ai vu
Bob Dylan
à l'
Olympia,
un grand flash, de style et de sensualité, et
Jimi Hendrix
aussi à la même époque ainsi que
Frank Zappa,
surtout
The Mothers of Invention
à cette époque-là aussi. Ces trois concerts m'ont
vraiment allumé la tête et m'ont donné envie d'explorer mon imagerie
intérieure et de développer un peu l'instrument dont je jouais déjà,
mais de façon plus kaléidoscopique, si l'on peut dire.
Ah Oui, je m'en souviens ! Il s'appelle Sirkel & Co, il est sorti en 1976.
Il a été enregistré aux Pays de Galles. Nous avons fait une post-production
à Londres aux
studios Olympic.
C'était une expérience intéressante,
une super production, mais un peu surproduit à mon goût, car il y avait
une section de cuivres, des choristes, etc.
Il y avait de très bons musiciens anglais.
Collin Allen
qui avait joué avec
John Mayall,
Mick Taylor,
Gordon Raitt,
Ronnie Leahy
qui était un excellent keyboard. A Londres,
il y a eu des choristes, une section de cuivres et Mick Taylor
est venu jouer sur 4 morceaux de ce disque.
C'est exact.
AM : Pour aller vivre aux Etats-Unis ?
J'avais un ami batteur qui était à New York. Il m'avait appelé
plusieurs fois en me disant tu devrais venir.
Cela n'allait pas très très fort pour moi à Paris,
alors je suis allé le rejoindre. Je ne savais pas si
je partais pour 15 jours, un mois, deux mois ou un an ou deux,
ou si j'allais y rester. J'avais quand même pris un billet
de retour pour me sécuriser. Finalement j'y suis resté 15 ans !
Je suis revenu deux, trois fois à Paris en 15 ans.
AM : Qu'est-ce que tu faisais aux Etats-Unis ?
J'essayais de me débrouiller. Cela n'a pas tellement accéléré ma carrière.
J'essayais surtout de me maintenir à la surface et puis de vivre.
J'ai fait pas mal de petits boulots. J'étais coursier,
j'ai fait des ventes par téléphone, plein de trucs comme ça
et puis j'ai réussi à monter mon studio de maquettes.
J'avais un petit business, les gens venaient enregistrer chez moi,
je faisais des productions et comme c'était un peu la montée du Rap,
j'avais pas mal de rappeurs qui venaient. Je leur faisais tout
le rythme, tous les instruments, le mixage... Cela me permettait
aussi d'enregistrer mes propres morceaux, ce qui a
toujours été important pour moi.
Tout à fait.
AM : Pourquoi ?
Pourquoi suis-je revenu ? Un peu ce qui a fait que je suis parti.
Cela n'allait pas ici donc je suis parti là-bas. Comme ça n'allait
plus là-bas, je suis revenu. Ce sont des choix, des périodes,
des phases de vie. Il y a tellement de raisons, ce n'est pas aussi
simple. Et puis je n'aime pas les tremblements de terre et il y en
a eu un gros. C'était le moment où les choses n'allaient pas
trop bien, j'ai donc pris la décision de revenir dans ma ville
natale, Paris, Paname.
Depuis que je suis rentré ?
AM : Oui, ou en général.
Avec des musiciens plus ou moins connus, avec qui je m'entendais
bien et qui se sont trouvés sur ma route. Celui dont je me souviens
particulièrement aux Etats-Unis, avec qui je suis toujours en
contact, s'appelle Theodore Welch, il joue des percussions et
de la batterie. Il jouait d'ailleurs avec Barry White sur ses
tournées internationales. C'est un bon copain, on s'est tellement
bien entendu que l'on a joué ensemble, c'est un bonheur de jouer
avec lui. Il joue d'ailleurs sur mon dernier disque, sur 3 ou 4 morceaux.
Et puis tous mes potes musiciens avec qui je joue en ce moment.
Je vais les présenter. Il y a Daniel Cambier, bassiste, je le connais
depuis 40 ans. Il jouait déjà sur mon deuxième album.
Jean-Bernard LePape à la batterie, que je connais depuis une
quinzaine d'années, on joue bien tous les trois.
Hubert Le Tersec,
aux claviers et Laurent De Gaspéri à la deuxième guitare. Voilà l'équipe que
j'appelle en ce moment, Funky, Blues and Groove Quintet.
Avant de partir aux Etats-Unis, je parlais déjà anglais.
J'avais déjà composé des chansons en anglais et en habitant
15 ans là-bas, j'écrivais principalement en anglais.
J'ai fini par mélanger les langues. Puis en rentrant en France,
j'ai plutôt réécris en français. Pour le dernier disque j'ai
fait un choix, il y a beaucoup d'instrumentaux mais je chante
en anglais. Sinon, effectivement j'ai toujours écrit 50 pour
cent des textes en français et 50 pour cent en anglais.
Oui.
AM : Qui s'appelle Soundscape Road.
Oui, Soundscape Road. J'en suis très content !
AM : Pourquoi as-tu choisi ce titre ?
C'est un des 14 titres de l'album. Il colle bien comme titre de
l'album car c'est un peu l'imagerie intérieure musicale,
le paysage du son. Il résume en deux mots la façon dont
j'appréhende la musique et je vis avec dans une espèce d'aquarium,
dans un paysage. Cet album est très joli, surtout l'intérieur,
je vous le montre car il est bien entendu moins visible que
le recto du disque.
AM : Qui a fait les photos qui illustrent la pochette ? Il y a des jolies photos.
Les photos sont faites par Patricia De Gorostarzu, que m'a
présenté Philippe Langlois, directeur de Dixiefrog. Elle a fait
les séances de photos et nous nous sommes tout de suite très bien entendus,
car elle a un sens du visuel, évidemment c'est son travail,
mais qui correspondait j'ai l'impression à la sensualité que je voulais
moi aussi dégager et présenter. Tout s'est bien passé,
je trouve qu'elle a fait un très bon travail.
AM : Qui a produit ce disque ?
C'est mézique, moi-même ! J'ai produit cet album tout seul.
AM : Sous quel label est-il sorti ?
C'est
Dixiefrog
qui publie cet opus. Philippe Langlois est le directeur.
Il a des oreilles formidables et il connaît en détail tous les titres.
Cela fait plaisir. On sent qu'il est passionné, donc la collaboration
se passe en bonne intelligence et bonne entente.
AM : Tu nous as dit qu'il y avait 14 chansons sur cet album. Ce sont toutes tes compositions ?
Toutes sauf 3. Il y a 14 titres. Certains sont très courts,
d'autres moyennement courts. J'aime bien l'album dans son entité,
dans son ensemble. Je suis un peu nostalgique du concept qu'il y
avait dans les années 70. Il y avait des belles pochettes et un 33 tours,
un album était vraiment comme un film, comme un voyage avec le psychédélisme,
le trip. L'ordre des albums, leur rythme, est hyper important,
pour faire en sorte qu'en suivant les titres et le déroulement de
l'album on soit vraiment immerger dans un paysage, dans un landscape.
Sur cet album il y a un titre de
Tom Rush,
un folk singer, encore en vie,
qui habite je crois au Canada, qui s'appelle Wild Child. Il y a également
I Dig Rock'n'Roll Music qui a été fait à l'origine par
Peter, Paul and Mary
dans les années 60. Il est beaucoup plus électrifié et
le son est beaucoup plus enrobé que l'original.
Et puis Walking The Dog de
Rufus Thomas
que les Rolling Stones avaient repris,
au début de leur carrière. Je le chante et le joue depuis belle lurette,
des décennies, je le chantais déjà avec mes premiers groupes !
C'est une très bonne question. A priori je ne décide pas d'un
thème ou d'un autre. En général quand j'écris une chanson,
deux lignes me viennent, c'est plutôt un truc, qui a un rythme
comme un instrument. Ensuite, j'en rajoute deux pour faire une
strophe qui m'évoque une idée, une piste qui se fait toute seule,
je n'ai pas à réfléchir. Dès fois cela aboutit à un sujet précis,
et parfois pas du tout, c'est plus des images, et quelquefois c'est
entre les deux. Pour développer un peu la réponse à ta question,
il se trouve que la première chanson The Fella, sur ce dernier disque,
est un petit peu antiféministe sur les bords, parce que je suis
très agacé par le féminisme belligérant qui manque terriblement
de psychologie et de perspicacité en ce qui concerne la psychologie masculine.
C'est un peu une réplique un peu ironique, je ne fais qu'effleurer le sujet.
Ce titre-là est surtout musical. Sinon les sujets des autres titres,
en ce qui concerne les lyrics, les textes sur ce disque sont beaucoup,
pour la plupart des images, ce qui peut évoquer l'imagerie visuelle et sonore,
le Soundscape Road, c'est toujours sur cette ligne-là. Je ne sais pas si
tout ceci est très clair, je me comprends et j'espère que si ce n'est pas
très clair, cela peut évoquer et faire sentir un peu l'ambiance du disque,
tout se complètera, se comprendra mieux peut-être en l'écoutant.
AM : Tout à fait !
On va jouer au
Sunset
à Paris à la fin du mois, le 29,
ce qui j'espère nous apportera d'autres concerts. On va aussi jouer à l'
Utopia
à Paris également, un petit mois après, vers fin juin et
puis pour l'instant il n'y a pas grand chose d'autre parce que j'étais
un peu dans ma bulle, les festivals sont bookés cette année,
donc on verra pour l'année prochaine. J'espère aussi que quelqu'un
s'occupera sérieusement de nous trouver des dates, car moi tout seul,
je ne suis pas excellent. Je n'aime tellement pas prendre le téléphone
pour dire écoutez-moi, donnez-moi des dates de concerts que je
le fais mal, je suis mal dans mes pompes quand je le fais et donc
cela marche mal, déjà que ce c'est difficile à faire pour tout un chacun.
Je suis un peu feignant à ce niveau-là.
AM : Donc un appel aux Tour Managers.
Oui.
AM : Eric à bientôt sur la route du rock et du blues, on espère pouvoir
te voir en concert très prochainement !
J'espère pouvoir vous y voir aussi !
AM : Oui avec plaisir. Nous te remercions pour ta collaboration sur rock-interviews.
C'est moi.